Colère des agriculteurs : insensible, l’administration persiste dans une vision décroissante

Un document de France Stratégie renforce la défiance des manifestants envers une administration totalement déconnectée de leurs préoccupations.

Par Antoine Copra

Temps de lecture : 2 min

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Emmanuel Ferrand n'en croit pas ses yeux. Cet agriculteur, maire de Saint-Pourçain-sur-Sioule (Allier) et membre du Comité national de l'eau (CNE), doit relire plusieurs fois le document reçu du ministère de la Transition écologique qui tente de prévoir l'évolution de la consommation d'eau en France et invite les membres du CNE à travailler sur un scénario de ses usages en 2050 à partir d'hypothèses résolument décroissantes.

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En pleine grogne des agriculteurs, les chiffres avancés comme base de travail donnent le tournis au maire : en 2050, la consommation de viande est divisée par deux. Le maïs ? 40 % de cultures en moins. La vigne ? Moins 20 %, comme pour la betterave et la pomme de terre. Partant de ces hypothèses, les besoins d'irrigation sont revus de 15 % à la baisse, malgré l'augmentation prévisible des périodes de sécheresse.À LIRE AUSSI Le vrai scandale de l'eau

Le document table sur « une baisse générale de l'activité industrielle ». Avec une diminution de 85 % de la construction neuve. Ou encore de 30 % de l'industrie pharmaceutique grâce à l'hypothétique développement de la marche et du vélo et à une alimentation moins carnée ( !). Quant au nucléaire, il est quasiment rayé de la carte, avec 80 % de production en moins.

Administration hors sol

Intitulé « Étude prospective des besoins en eau », le document porte l'en-tête de France Stratégie, institution autonome placée auprès du Premier ministre et chargée d'« éclairer les choix collectifs sur les enjeux sociaux, économiques et environnementaux ». Ses prévisions s'appuient sur l'étude Transitions 2050 de l'Ademe. Parmi les quatre scénarios qui mènent à la neutralité carbone, le choix s'est porté sur l'un des deux décroissants, qui aboutit à « une réduction de la consommation en eau ». Au détriment de certaines productions agricoles. Les scénarios reposent pourtant sur des bases fragiles, l'Ademe reconnaissant que ses « indicateurs de la dépendance à l'eau [sont] une première approche qu'il conviendrait d'affiner ».

Alors que la colère des agriculteurs explose, Emmanuel Ferrand regrette la « totale déconnexion de l'administration » : « L'état d'esprit de nombreux agriculteurs, c'est qu'on ne s'en sortira pas sans “tout faire péter”. Ils veulent des perspectives. Comment s'entendre avec des services de l'État qui leur en proposent moins ? »

L'Ademe ne privilégie aucun de ses quatre scénarios, la trajectoire adoptée « relevant de choix politiques ». Pourquoi anticiper une baisse de la demande plutôt que donner aux agriculteurs les moyens de se développer ? Quelle est la plus-value d'une administration qui s'illusionne sur l'évolution de la consommation ? Et quelle est la légitimité électorale de cette prophétie autoréalisatrice ?

Développement, décroissance ? Le cabinet de Christophe Bechu dément totalement que ce scénario soit une hypothèse de travail, et déplore ce 30 janvier une erreur de communication de la part de ses services. « Ce scénario de rupture n'a pas été validé par le ministère », précise-t-il.

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Commentaires (40)

  • Pignon.fr

    L’ oisiveté est mère de tous les vices, tous les fonctionnaires employés à des missions non régaliennes ou hors santé sont beaucoup trop nombreux et créent des tracasseries administratives plombanr l’activité de la France … sans compter leur cout.

  • INTERSTELLAR

    La voix de son maître. Le vent des promesses d’un État en faillite ne valent pas tripette ! Fuyez loin, très loin ce pays perdu.

  • gégéhll

    Gambetta disait " l'homme politique doit être quelqu'un, le fonctionnaire quelque chose".
    Et si nos politiques devraient quelqu'un ?