Le bonus sélectif entraîne l’automobile vers la guerre des prix

Aidé pour atténuer un surcoût de 30 %, le marché des voitures électriques perd tout sens de la mesure depuis la privation de bonus pour la production chinoise.

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Porté par le succès de sa gamme électrique, MG Motor réalise une année 2023 sans précédent avec 34 441 immatriculations. 2024 commence très fort sans bonus mais avec une aide pouvant aller jusqu'à 7 000 euros jusqu'au 31 janvier sur les voitures en stock.
Porté par le succès de sa gamme électrique, MG Motor réalise une année 2023 sans précédent avec 34 441 immatriculations. 2024 commence très fort sans bonus mais avec une aide pouvant aller jusqu'à 7 000 euros jusqu'au 31 janvier sur les voitures en stock. © MG

Temps de lecture : 4 min

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Du côté de Bercy, on peut s'interroger sur la validité du vaste plan d'aide à l'achat des voitures électriques. Pour être exact, c'est moins le client que l'on aide que les constructeurs, incités à conduire à marche forcée une mutation technologique et industrielle sans précédent. Elle l'est car ce ne sont pas les impératifs technologiques qui y poussent, mais une position dogmatique des États qui conduit à éliminer une technologie mature au profit d'une autre encore balbutiante.

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Si nous avons souvent soulevé ici l'erreur de calendrier et de stratégie qui a forcé cette mutation poussée par un lobby vert et contre les attentes du marché, on constate aujourd'hui que cette précipitation a laminé un avantage stratégique des Occidentaux et déroulé un tapis rouge aux productions communistes. La Chine a délibérément fait ce choix de l'électrique comme elle l'a fait auparavant de l'électroménager, de l'informatique, de la téléphonie, des panneaux solaires et désormais de l'automobile. Les jeunes dragons poussent chaque jour avec des voitures de plus en plus séduisantes si l'on raisonne en termes de propulsion électrique.

Certains prédisent déjà une courte espérance de vie, pronostiquant l'arrivée d'autres sources d'énergie en cours de développement dans les laboratoires. Mais en attendant, cela semble bien parti pour l'électrique, selon un système de mobilité nullement apaisé contrairement à ce qu'on se plaît à dire. Véhiculant surtout du stress avec la difficulté du ravitaillement, l'automobile d'aujourd'hui impose les mêmes stratégies d'arrêts à la borne que les smartphones. Dès que l'on s'arrête, on recharge avec, en épée de Damoclès, les nombreuses défaillances d'un réseau dont trop de bornes sont inopérantes et tardent à être réparées, comme l'a vécu notre confrère Caradisiac.

Tout pourrait en rester là si on laissait libre l'acheteur de rouler dans ce qu'il veut. Mais la pression monte progressivement pour dissuader les utilisateurs de thermiques en offrant par exemple un bonus d'aide à l'achat électrique alléchant. À Bercy, où l'on finance ces bonus à raison de 1,7 milliard par an, la désescalade est cependant amorcée pour parvenir à une équité qui n'aurait jamais dû être abandonnée entre thermiques et électriques. À ce stade, et alors que les règles du bonus 2024 n'ont toujours pas été publiées au Journal officiel, un fait est acquis, les voitures venues de Chine n'ont plus droit à ces coups de pouce de l'État.

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Conséquence immédiate, les constructeurs concernés compensent en finançant leurs propres bonus, ce qui a aussitôt déclenché une réplique des marques occidentales, qui cassent à leur tour les prix en dépit d'un bonus maintenu. Cela laisse songeur sur l'utilité du système étatique, voué à disparaître, mais aussi des marges réalisées par les constructeurs, pour certains proches de zéro. Pour le moment, il y a deux poids et deux mesures, et une guerre des prix impitoyable qui va faire durer le temps des soldes dans l'automobile.

La faute à Tesla

Notre confrère Auto Infos en recense un certain nombre : « Les deux dernières baisses de tarifs concernent le constructeur chinois MG Motor, qui a d'abord consenti une remise de 4 000 euros, puis de 7 000 euros une semaine plus tard [mais jusqu'au 31 janvier NDLR]. Dacia, avec sa voiture électrique Spring, accorde une remise de 2 400 € en France puis de 10 000 € en Allemagne ! BYD a, lui, fait fondre de 14 % les tarifs de l'Atto 3 (37 990 euros, contre 44 190 précédemment), privé de bonus écologique. Chez Renault, par exemple, les tarifs de la Mégane E-Tech électrique ont été allégés de 4 000 € début 2024. Le catalogue de la compacte 100 % électrique « made in France » débute désormais à 34 000 euros (hors bonus écologique). Un repositionnement logique puisqu'il accompagne le lancement commercial du nouveau Renault Scénic E-Tech Electric, proposé sous la barre symbolique des 40 000 €. Du côté de Volkswagen, les avantages clients accordés sur les ID.3, ID.4 et ID.5 sont compris entre 6 470 et 11 370 €. La gamme Volkswagen ID. est donc à présent accessible à partir de 39 990 € ».

Ajoutons les opérations japonaises de Toyota, qui offre 6 000 euros de rabais pour toute commande du SUV compact BZ4X électrique avant fin février (49 000 euros, au lieu de 55 000 précédemment). Nissan s'y met aussi avec 5 000 euros de rabais sur l'Ariya, produite au Japon et qui descendra du coup à 38 300 euros.

On le voit, c'est la foire d'empoigne, mais il faut rendre à Tesla ce qui lui revient, c'est bien lui qui a amorcé cette baisse spectaculaire des tarifs début 2023 en anticipant l'arrivée de nouveaux concurrents alors que jusque-là, l'américain pratiquait la monoculture sans partage. Cette initiative tarifaire a fait le miel de ses nouveaux clients l'an dernier, mais a suscité la colère des anciens, dont la valeur résiduelle du véhicule s'en est trouvée affectée. Que dire aussi des gérants de flottes qui doivent, avec ce yo-yo tarifaire, s'y retrouver.

Aux États-Unis, Hertz a annoncé se séparer d'un tiers de ses véhicules électriques, soit 20 000 véhicules dont beaucoup de Tesla, en raison de ces valeurs résiduelles mauvaises et un coût des sinistres très supérieur. Elles seront remplacées par des voitures thermiques beaucoup plus faciles à gérer, ce qui n'est pas de nature à maintenir la cote des Tesla outre-Atlantique. La leçon devrait être entendue en Europe mais le risque de surstocks pointe à l'horizon alors que la demande de voitures électriques s'essouffle et que quelques constructeurs ont déjà décidé de ralentir leurs chaînes de production. En raison de l'Allemagne notamment, où le système du bonus électrique a été supprimé.

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Commentaires (19)

  • Saint cat

    Principe en politique : si l'état subventionne quoi que ce soit, méfiez-vous, en général c'est une arnaque.

  • Flo-P

    Beaucoup d'inexactitudes dans cet article. Passons sur Cardisiac, qui utilise des voitures à faible autonomie et vitesse de charge pas vraiment prévues pour les longues distances, qui décharge en dessous des 10%, ce que ne conseillera jamais un planificateur, et qui considère Ionity comme un réseau fiable alors que c'est devenu l'un des pires. Attribuer la responsabilité du passage à l'électrique à l'état français est tout aussi absurde. Tesla et MG n'auraient certainement pas attendu des lois européennes pour expédier leur marchandise en France, ils ne concurrencent non pas l'électrique européen (qui n'est pas dans la même gamme de prix) mais le thermique européen, c'est bien ce qui déplait à nos constructeur dont aucun (à part Dacia qui fabrique en chine) ne vend de voiture thermique de gamme équivalente moins cher qu'une MG4 ou une TM3, sans parler du coût d'utilisation nettement inférieur pour l'électrique et de la durée de vie quatre fois supérieure. Le passage à l'électrique n'est pas une affaire de réglementation ou d'écologie, contrairement à ce que dit l'article, mais d'une maturité qui est belle et bien là. Il suffit de conduire une électrique pour comprendre que le thermique a vécu : peu puissant, bruyant, polluant, difficile à conduire, ... Il est amené à mourir quoi qu'il arrive. Ensuite je ne vois pas en quoi les ventes d'électrique s'essoufflent, les ventes sont en très nette progression chaque mois depuis plusieurs années et les prix en baisse (malgré la fin du bonus).

  • le Sanglier de MontBertrand

    Epelle 17-01-2024 • 15h31 : "Dacia Spring, mauvais élève de l’électrique : 100% made in China, 4 places maximum, 45 cv (ou 64) ce qui est très insuffisant pour l’autoroute, et 200 km d’autonomie maximum. Malgré un tarif élevé, c’est quand même limite. "

    100% made in China. Comme la plupart des objets de notre vie moderne. C'est mauvais pour une voiture électrique, mais c'est bon pour tout le reste ? On en parle de l'électroménager, des machines outils, etc.

    4 place maximum. Et même plutôt 2, mais adapté à la plupart des transports journaliers qui se font seul au volant. Moins d'une tonne pour aller faire les courses ou au boulot pour 2 places alors qu'on est seul au volant c'est quand même mieux que 2, 5 tonnes pour 5 places alors qu'on est seul au volant.

    insuffisant pour autoroute : vous prenez l'autoroute tous les jours et vous pouvez rouler dessus à 130 ou plutôt péniblement à 60 dans les bouchons ? Moi quelques fois je prends la RN88 limitée à 110, ça tombe bien ma Spring est limitée à 125

    200 km d'autonomie. Vous faites plus de 200 km tous les jours, vous ? Moi c'est plutôt par semaine ce qui fait déjà 10000km par an.

    Tarif élevé. Quand je l'ai acheté j'avais la prime. C'était de loin la moins chère du marché.

    J'ajoute : comment faire pour les vacances ? Si vous habitez en ville, vous avez suffisamment de moyens de transports publics pour vous passer de voiture. Partez en vacance en train et louez une voiture à l'arrivée. Moi au fin fond de ma campagne il me faut une petite voiture pour mes déplacements quotidiens sur des petites routes. Comme j'habite en pleine cambrousse et en maison individuelle, pas de problème pour brancher ma Spring chez moi surtout avec mes panneaux solaires. En été je roule pour 0€ de carburant, sinon en hiver c'est 2-3€ les 100 km.

    Mais juger de la viabilité d'une voiture pour un déplacement par an pour partir en vacance alors que tous les autres jours vous faites 10 km seul au volant dans les bouchons c'est comment dire ?