Périphérique, taxe au poids et SUV, Hidalgo n’a rien inventé

L’effet de seuil devrait être un casse-tête pour appliquer les mesures de la maire de Paris qui s’inspire d’un cadre plus général, déjà opérationnel à Bercy.

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Le critère pour échapper à la taxe étant de parcourir au moins 50 km sur la seule ressource électrique, le nouveau Renault Espace voit la plupart de ses versions passer à la caisse avec un poids de 1 622 à 1 749 kg.
Le critère pour échapper à la taxe étant de parcourir au moins 50 km sur la seule ressource électrique, le nouveau Renault Espace voit la plupart de ses versions passer à la caisse avec un poids de 1 622 à 1 749 kg. © Renault

Temps de lecture : 5 min

Ce n'est pas l'urinoir sur la place du village de Clochemerle qui fait controverse, mais une ceinture de chasteté parisienne pour s'abriter des hordes venues d'au-delà du périphérique. Très clairement, la politique parisienne devenue autophobe ne date pas d'hier entre stationnement payant hors de prix, P.-V. tombant comme à Gravelotte, sens de circulation abracadabrantesque et grignotage de l'espace urbain.

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Depuis la réduction de surface accordée aux véhicules au profit des piétons, érigée en dogme, Chirac, Tiberi ou Delanoë ont chacun apporté leur patte à cette chasse à l'automobile. Assez souvent à bon escient pour revivifier des quartiers comme les Halles ou le Sentier, d'autres fois de façon absurde sur les boulevards et grands axes en embouteillant sciemment des voies de dégagement conçues par Haussmann. La rue de Rivoli ou les quais en sont de bons exemples, voilà désormais le tour du périphérique dit « parisien ».

Sauf erreur, il y a bien deux côtés à cette boucle urbaine avec des habitants également concernés de part et d'autre. Elle permet notamment de faire du banlieue-banlieue et du transit régional sans traverser Paris. Mais manifestement, il y a pour Mme Hidalgo l'intérieur « royal », celui des Parisiens, et l'extérieur, celui de la « plèbe » de la première couronne. En proposant d'abaisser une fois de plus et unilatéralement la vitesse qui fut jadis de 90 km/h avant de passer à 80 km/h en 1993 et 70 km/h en 2014, on recherche non plus à fluidifier mais à geler les flux.

Bataille Paris-Banlieue

Tout cela au nom de la pollution agitée comme un hochet mais, pour être sérieux, il faudra établir la différence entre un flux de circulation qui passe rapidement et les mêmes voitures à allure de tortue, enchaînant arrêts et redémarrages sous les fenêtres des riverains. Ici, la pollution n'est pas celle que l'on croit, c'est celle de Mme Hidalgo qui a décidé de pousser son pouvoir de nuisance aux limites du territoire de la ville.

C'est assez dire le dédain qu'elle nourrit pour les banlieusards car, si elle entend consulter au travers d'un vote sur la question les gens concernés, il serait assez juste d'y associer les résidents « hors les murs ». Sinon, cela ressemblerait fort à un octroi que Mme Hidalgo entend ériger pour protéger ses administrés. Clément Beaune, le ministre des Transports, a dit son opposition à toute réduction prochaine de vitesse, mais si les électeurs prêtent un avenir politique à la dame, on peut se préparer aux strates inférieures qui fatalement suivront le 50 km/h. En d'autres termes, aux urnes citoyens, exprimez-vous !

Et puis il y a l'autre affaire hidalguesque qui s'agite beaucoup pour faire oublier ses vacances en Polynésie. Elle a proposé de tripler le prix du stationnement des SUV que les Verts détestent et que les Français – mais pas qu'eux – adorent. Les critères d'identification entre ce qu'est un SUV et ce qui ne l'est pas promettent de belles foires d'empoigne. Les pervenches disparues n'auront pas de migraine mais le contrôle automatisé va devoir affûter son logiciel de reconnaissance des véhicules qui va coûter un bras. Un moment évoqué, le seuil fixé selon la hauteur du véhicule à partir de 1,60 m semble trop complexe à utiliser car, en fonction des roues ou de la présence de barres toit, on peut passer du mauvais côté de la jauge.

La punition commence à 1 600 kg

Plus intéressant est le critère au poids qui est moins sot qu'on ne le pense et qui existe déjà au niveau national. Il a inspiré la maire de Paris qui a décidé de tripler le prix du stationnement des SUV dans les quatre arrondissements du centre et de le doubler dans les autres. Une vraie mesure punitive pour des usagers déjà lourdement sollicités. Fixée à 10 euros le kilo au-delà de 1 800 kg, la tare s'avérait douloureuse lorsqu'elle a été instituée pour les voitures thermiques neuves le 1er janvier 2022.

La barre va être descendue le 1er janvier prochain à 1 600 kg, englobant beaucoup plus de modèles recensés par notre confrère L'Argus. Un an plus tard, les hybrides rechargeables seront concernés à leur tour, ce qui risque fort de signer leur arrêt de mort en raison de leur poids plus élevé. Un comble pour un véhicule supposé épargner l'air des villes, mais le projet a finalement accordé un abattement de 200 kg (dans la limite de 15 % de la masse globale) pour ceux disposant d'une autonomie électrique de plus de 50 km.

Pour les véhicules thermiques victimes de toute évidence d'une chasse aux sorcières, la taxe va s'alourdir en 2024 puisque les 10 €/kg seront applicables pour les seuls véhicules allant jusqu'à 1 799 kg. Pour la tranche suivante, jusqu'à 1 899 kg, ce sera 15 €, puis 20 € jusqu'à 1 999 kg, 25 € jusqu'à 2 099 kg et 30 €/kg à partir de 2 100 kg. Pour le moment, toutes les voitures électriques sont exemptées, mais on sait bien qu'en matière de taxes en France, le statut protégé n'est que provisoire.

À quand le tour des électriques ?

Et avec les enclumes roulantes embarquant une demi-tonne de batteries, l'épée de Damoclès plane déjà au-dessus des électriques dont l'essor non compensé par l'impôt n'aide pas à remplir les caisses de l'État. Et la manne des recettes fiscales générées par les voitures thermiques se tarit dangereusement alors que les voitures sur batteries ne font que coûter à la communauté.

On peut s'attendre aussi à quelques scènes cocasses d'où la contestation n'est pas exclue. En effet, juger au poids, c'est s'exposer aux effets de seuil. En d'autres termes, 1 599 kg ou 1 600 kg, ce ne sera pas la même chose même si la pénalité encourue apparaît supportable. Là, il faudra être raisonnable sur les options qui pèsent. On a bien compris que pour un kilo en trop, la contestation va faire rage et les technocrates de la mairie ou de Bercy ne savent pas ce qui les attend.

La lecture d'une fiche technique automobile varie en effet, à modèle égal, en des dizaines de versions selon le pack technique retenu et les équipements choisis. Si une taxe spéciale est calculée sur ce critère, il va de soi que, sous la pression des consommateurs, les constructeurs devront fournir l'information modèle par modèle, authentifiée par la mention portée sur la carte grise.

Sur ce point, Mme Hidalgo pourra se retrancher derrière la grille de Bercy et de l'Ademe, mais il lui appartient tout de même de ne pas matraquer les SUV avec un tarif horaire multiplié par trois en centre-ville, doublé ailleurs. « Plutôt que de me garer pendant que ma femme fait une course, j'aurai avantage en attendant à tourner dans le quartier, ce qui me coûtera beaucoup moins cher qu'un stationnement », dit un observateur. La pollution, elle, n'y gagnera rien.

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Commentaires (12)

  • DominiqueD2B

    Nous voyons bien qu’une décision par jour d’idéologue, nous obligeant à changer nos projets d’achat de véhicules, est prise par nos sectes dirigeantes. Je vois bien qu’on nous oblige aujourd’hui à acheter des véhicules électriques, mais que d’ici un an, on aura inventé une lubie pour nous en empêcher. Désolé, mais je garde mon bon vieux diesel…

  • toucap

    Il faut bien comprendre que Mme Hidalgo comme certains écolos sont des histériques. Ils n'agissent que pour punir. J'ai un véhicule hybride rechargeable qui fait plus de 80 km en mode électrique. Je conduis cool (très agréable avec le silence) et donc je ne pollue jamais quand je fais de la ville.
    Par contre certaines petites voitures qui démarrent à fond au feu vert en fumant sont tolérées (vous avez remarqué qu'il n'y a plus de contrôle antipollution en ville ou sur route).
    Voilà : les vaches font du méthane donc il faut manger des haricots (mais ils en font aussi), les chiens et les chats ne sont pas écolos (donc à supprimer), le travail pollue la planète (donc ne travaillons pas, ... ).
    L'avenir écologique est super attirant : il faut arrêter de vivre !
    Bien sûr qu'il faut protéger la planète, mais dépolluons là avec intelligence.

  • jpleg

    Il y a bien longtemps que je ne vais plus à Paris. Pourquoi voulez-vous vous enquiquiner dans cette ville imbuvable qui sur le papier est encore la capitale de France mais dont les français hors les murs n’ont plus accès. N’insistons pas, laissons les parisiens entre eux et pensons fortement à trouver une solutions pour taxer les véhicules des parisiens qui viennent en province, petits et gros !
    mais ce qui se passe à Paris est à un degré moindre ce qui se passe dans les autres ville du pays. Les maires écolos ou ceux qui ne le sont pas mais poussés par la pression écolo, sont entrain d’installer outre les difficultés de circulation et de stationnement, un rempart administratif pour tous les habitants de la campagne environnante. Ces derniers ne peuvent bientôt plus venir en ville que lors de manifestations comme par exemple les gilets jaunes dont on a bien vu l’effet quand ils arrivent ! La ville appartient à ceux qui y habitent. Les autres n’y viennent plus, ils s’arrêtent dans les hyper qui ont bien compris la stratégie, bloquent et détournent à leur profit les provinciaux des nos villes. Pendant ce temps, les commerces des centre villes dépérissent et nos commerçants vivent déjà la décroissance chère à Sandrine Rousseau ! Dramatique !