Les vélos-cargos, la petite révolution du transport urbain

En ville, livreurs et artisans troquent de plus en plus leur camionnette pour un biporteur ou un triporteur électrique. La demande est telle que l’offre peine à suivre.

Par Roman Scobeltzine

Parfaits pour évoluer dans le trafic et les rues étroites des centres-villes, les vélos-cargos peuvent à certaines conditions emprunter les voies cyclables.
Parfaits pour évoluer dans le trafic et les rues étroites des centres-villes, les vélos-cargos peuvent à certaines conditions emprunter les voies cyclables. © DR

Temps de lecture : 5 min

De gré ou de force, de plus en plus de chauffeurs livreurs délaissent le confort douillet de leur camionnette diesel pour enfourcher des vélos-cargos électriques à deux ou trois roues. Cette petite révolution des transports urbains, qui répond aux appels à la sobriété énergétique, est en train de conquérir les acteurs de la livraison urbaine, des petits entrepreneurs aux grands groupes bien obligés de verdir leur parc de véhicules. Parmi ces derniers, La Poste, UPS et DHL, qui traitent à eux seuls plus de 90 % des colis en France métropolitaine.

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Porté par l’explosion de l’e-commerce et la multiplication des livraisons en ville, un phénomène amplifié avec la pandémie de Covid, le marché du vélo-cargo croît de manière exponentielle depuis trois ans. Les ventes avaient doublé entre 2021 et 2022, pour atteindre 33 000 exemplaires en France. Et elles continuent à croître depuis, selon l’union Sport & Cycle.

Si ces engins de transport ne représentent encore que 1 % des ventes de l'ensemble des vélos à assistance électrique (VAE), l'offre se multiplie avec un choix de modèles toujours plus large. Il y a les biporteurs (deux roues et une caisse, avec ou sans remorque), les triporteurs (trois roues et une caisse) et les « longtails » (vélos allongés pour le transport de marchandises).

Tous peuvent supporter une charge d'au moins 100 kg et embarquer de 0,4 à 1,5 m3 de volume selon les modèles. Selon l’union Sport & Cycle, le prix moyen d’un vélo-cargo électrique est de 4 200 euros, le double de celui d’un modèle sans assistance électrique. Pour les trois-roues de type triporteur, comptez au moins 8 000 euros.

En location pendant trois mois

Parfaits pour évoluer dans le trafic et les rues étroites des centres-villes, ces véhicules peuvent également emprunter les voies cyclables, à condition de répondre à la réglementation propre aux VAE : un moteur de 250 watts au maximum et une vitesse limitée à 25 km/h. Ce qui ne dispense pas les conducteurs de pédaler pour avancer.

Leader français du vélo-cargo à deux roues (biporteur), le fabricant Douze Cycles voit ses commandes doubler chaque année depuis dix ans. Avec ses deux sites près de Dijon (Côte-d'Or) et une production annuelle de 6 000 vélos, l'entreprise se targue de produire ses cadres en France. À l'occasion d'un partenariat inédit avec Toyota, elle commercialise notamment, depuis février, le Cargo Verso, un biporteur électrique distribué à 6 190 euros dans les 270 concessions du constructeur en France.

À LIRE AUSSI Transport à vélo : une coopérative rennaise parmi les pionniers « Les constructeurs cherchent à diversifier leur offre et à faire cohabiter véhicules traditionnels d'un côté et solutions de mobilité douce de l'autre », explique Thomas Coulbeaut, fondateur de Douze Cycles. La marque est également partenaire du projet Véligo en Île-de-France, qui consiste à proposer des vélos électriques en location pendant trois mois, pour encourager le public à franchir le pas. Grâce à ce dispositif, 90 000 VAE ont ainsi pu être testés en Île-de-France, dont des vélos-cargos destinés aux professionnels.

Décarboner totalement les livraisons urbaines

De son côté, La Poste – l'un des pionniers de la cyclologistique – est l'un des plus gros clients du marché. Le groupe exploite déjà une flotte de 18 000 VAE pour ses tournées, tandis que le nombre de vélos-cargos – triporteurs et biporteurs à remorque – sera d'un millier au minimum d'ici à 2025. À noter : les plus gros modèles peuvent remplacer une camionnette de 8 m3 en ville.

« Notre objectif est de décarboner totalement les livraisons urbaines dans les grandes villes de France en 2025, soit l'ensemble des zones à faibles émissions (ZFE). À cette échéance, une livraison Colissimo sur deux sera neutre en CO2 en France », assure Jean-Louis Carrasco, directeur de la logistique urbaine à La Poste. Le groupe a d'ailleurs mis en place une organisation spécifique pour ses vélos-cargos, avec des centres logistiques urbains leur permettant de distribuer jusqu'à 70 adresses en six heures avec une seule charge.

À LIRE AUSSI Écologique et économique : l'avenir appartient-il (vraiment) au vélo ? Seul problème, les délais de livraison s’allongent pour tous les VAE. S’il y a de plus en plus de fabricants français qui produisent localement, une vingtaine, selon l’union Sport & Cycle, beaucoup de pièces – transmission, moteur et batterie – viennent d’Asie et sont donc soumises aux perturbations géopolitiques.

Compte tenu de l'ampleur du marché et du nombre de vélos-cargos en circulation, « il manque aussi un réseau national de centres de réparation et d'entretien, capable d'intervenir vite et avec un stock de pièces suffisant pour remettre en état les vélos usés ou endommagés », regrette Jean-Louis Carrasco.

Un contexte fortement incitatif

Après son plan Vélo et mobilités actives, lancé en 2018, le gouvernement a fortement encouragé la cyclologistique avec, à la clé, 12 millions d'euros de certificats d'économie d'énergie (CEE). L'objectif est de réduire les émissions polluantes issues du transport de marchandises en ville, une activité qui représente 15 à 20 % du trafic mais génère 45 % des particules fines émises, du fait des arrêts et redémarrages fréquents des véhicules.

À LIRE AUSSI Toulouse – Bienvenue dans la Vélo Vallée « Entre les politiques publiques, le développement des voies cyclables et les ZFE, le contexte est fortement incitatif pour le vélo-cargo », reconnaît Caroline Faucon, coprésidente de l'association Les Boîtes à vélo France, qui représente le monde du travail à vélo depuis 2019. « On voit de plus en plus d'exemples de livreurs ou d'artisans qui décident de remplacer leur camionnette par un vélo à assistance électrique, classique ou cargo. Mais, pour que ces professionnels sautent le pas, il faut des incitations fortes », rappelle-t-elle.

À Lyon, par exemple, il est possible de cumuler jusqu'à 3 000 euros d'aide de la métropole pour l'achat d'un vélo-cargo, auxquels peuvent s'ajouter le bonus écologique (300 euros) et la prime à la conversion (1 000 euros). Reste, pour les artisans, à réorganiser leurs chargements en fonction de leurs chantiers, quitte à embarquer moins d'équipements et à se faire livrer du matériel encombrant directement sur place. Les bénéfices se font alors vite sentir avec des frais de carburant et de stationnement réduits, moins de stress dans la circulation et un certain capital sympathie chez les clients. Cela vaut bien quelques sacrifices de confort.

Le vélo-cargo en chiffres

Cargo Verso, le passe-partout de Toyota et Douze Cycles

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©  DR
La version professionnelle du Cargo Verso de Toyota peut transporter des charges jusqu’à 100 kilos.
© DR

La version professionnelle du Cargo Verso de Toyota peut transporter des charges jusqu'à 100 kg, directement sur le plancher de la plateforme avant ou dans une grande caisse spécifiquement adaptée de 270 litres. Un attelage peut également être fixé au cadre, pour tracter une remorque et augmenter encore la capacité d'emport. L'engin est équipé de deux freins à disque à commande hydraulique. Il peut également franchir les trottoirs et les passages surélevés grâce à une béquille centrale rétractable.

Son moteur électrique de 250 watts permet d'atteindre 25 kilomètres à l'heure, tandis que sa batterie amovible de 500 watts peut être rechargée entièrement en quatre heures sur une prise de courant standard. En fonction de l'utilisation, l'autonomie peut atteindre jusqu'à 100 kilomètres avec une seule charge. Prix : à partir de 6 190 euros.

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Commentaires (9)

  • spirrou31

    L'important serait que ces équipements, plus imposants que les vélos mais conduits tout aussi anarchiquement, restent sur les pistes cyclables et n'encombrent pas les troitoirs. Et tant qu'à faire s'ils pouvaient être interdit de circuler en contresens cyclable du fait de leur largeur ce serait également mieux...

  • Vazy-Toto

    J'ai connu Djakarta en 1978 avec ses centaine de milliers de Betc. Hak (pousse-pousse) aves vélo arrière, j'ai l'impression de rajeunir, sauf qu'il manque les indonésiens pour pédaler, car, eux, n'avaient pas de moteur !
    Au passage, leur engin servait aussi de maison, car la nuit, ils dormaient dessus le siège avant !

  • Desolé

    Ce retour à un nouvel esclavage au nom de l'écologie est scandaleux.
    Au cours des siècles les progrès tendaient à soulager l'homme de travaux pénibles et, à présent, on est face à une régression.